La 27ème conférence des parties sur le changement climatique. Objectifs et bilan.
La 27ème conférence des parties sur le changement climatique. Objectifs et bilan.
Les participants à la 27ème Conférence des parties, le 16 novembre 2022

Introduction

Le dimanche 6 novembre 2022 a marqué le coup d’envoi de la 27ème conférence des parties (COP 27) sur le changement climatique à Charm El-Cheikh, en Égypte. En 1992, lors du sommet de Rio au Brésil, 154 États, reconnaissant l’existence d’un changement climatique d’origine humaine, ont décidé, de joindre leurs efforts pour limiter le réchauffement global. Ainsi est née la Convention Cadre des Nations unies sur les changements climatiques (ou CCNUCC) et son organe de prise de décision, la Conférence des Parties (ou COP). Une COP réunissant toutes les « Parties à la Convention » se tient chaque année soit à Bonn, siège du secrétariat, soit par rotation dans un des pays des cinq groupes régionaux de l’ONU. Chaque COP permet de faire le point sur l’application de la Convention, de préciser la mise en œuvre des décisions et de négocier de nouveaux engagements avec des objectifs communs ou individuels. Les décisions sont prises par consensus.

Les COP rassemblent les représentants de chaque pays signataire de la CCNUCC; soit, en 2021, 196 États ainsi que l’Union européenne. La CCNUCC constitue ainsi une convention universelle, mais les COP rassemblent aussi des acteurs non étatiques : organisations gouvernementales et non gouvernementales, collectivités territoriales, syndicats, entreprises, scientifiques, jeunes… Les organisations du système des Nations unies participent également à ces discussions, chacune dans leur domaine de compétence.

Alors que la COP26 à Glasgow avait pour objectif de relever l’ambition mondiale, en particulier en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre, le rapport de synthèse des Nations unies a souligné que les engagements des États n’étaient pas encore suffisants. La COP27 a donc été celle de l’approfondissement de l’ambition et de la mise en œuvre, afin de maintenir la possibilité de limiter le réchauffement mondial à 1,5°C. Se tenant en Afrique, cette COP a aussi été celle de la solidarité et de la coopération entre pays développés et pays en développement. Cette année, Haïti s’est fait représenter par une délégation de 15 cadres multisectoriels pour défendre ses intérêts dans les discussions.

Quatre principaux thèmes étaient au centre des débats entre les représentants des différentes parties prenantes:

  1. Adaptation : l’adaptation au changement climatique consiste à apporter des ajustements aux systèmes, processus et pratiques écologiques, sociaux et économiques afin de s’adapter à la fois aux effets réels du changement climatique et aux dommages potentiels à venir. En outre, elle consiste également à tirer le meilleur parti de toutes les opportunités bénéfiques potentielles associées au changement climatique.
  2. Atténuation (ou mitigation) :  l’atténuation du changement climatique fait référence à toutes les actions ou efforts entrepris pour réduire les niveaux d’émissions de gaz à effet de serre dans l’atmosphère afin d’empêcher un nouveau réchauffement de la planète. L’atténuation peut consister à réduire les sources de ces gaz, par exemple en utilisant de nouvelles technologies et des énergies renouvelables, ou à renforcer les « puits » tels que les forêts et les sols qui stockent ces gaz.
  3. Financement pour le climat : le financement pour le climat permet aux pays de réduire les émissions de gaz à effet de serre, par exemple en finançant des énergies renouvelables comme l’énergie éolienne ou solaire. Grâce à ce financement, les communautés peuvent également s’adapter aux effets des changements climatiques.
  4. Pertes et dommages associés au changement climatique : évènements extrêmes et événements à évolution lente dans les pays en développement qui sont particulièrement vulnérables aux effets néfastes du changement climatique.

La Conférence, cette année, est tenue dans un contexte d’événements météorologiques extrêmes dans le monde entier, d’une crise énergétique alimentée par la guerre en Ukraine et de données scientifiques réitérant que le monde ne fait pas assez pour lutter contre les émissions de carbone et protéger l’avenir de notre planète. Selon Ilana Seed, Représentante permanente des Palaos auprès des Nations Unies et négociatrice sur le climat, la guerre en Ukraine a lieu, donc il y a tellement de choses sur lesquelles tant de pays se sont mis d’accord, et maintenant ils ne peuvent plus le faire. À cause de la guerre, le paysage a changé ». Elle a expliqué que l’invasion de l’Ukraine par la Russie a provoqué une crise mondiale de l’inflation, de l’énergie, de l’alimentation et de la chaîne d’approvisionnement. Des pays comme l’Allemagne ont dû réduire leurs objectifs climatiques à court terme, tandis que le groupe de travail historique Chine -États-Unis sur le climat annoncé à Glasgow a été suspendu.

Les grands objectifs de la 27ème Conférence des parties

1. Atténuation/Mitigation : Comment les pays réduisent-ils leurs émissions ?

L’atténuation du changement climatique fait référence aux efforts visant à réduire ou à prévenir les émissions de gaz à effet de serre pour limiter le réchauffement global à moins de 2o C et maintenir en vie la cible de 1.5o C. L’atténuation peut signifier l’utilisation de nouvelles technologies et de sources d’énergie renouvelables, l’amélioration de l’efficacité énergétique des équipements plus anciens ou la modification des pratiques de gestion ou du comportement des consommateurs. Les pays doivent montrer comment ils prévoient de mettre en œuvre l’appel du Pacte de Glasgow, en lien avec leurs engagements par rapport à l’Accord de Paris, de revoir leurs plans climatiques et de créer un programme de travail lié à l’atténuation.

2. Adaptation : Comment les pays vont-ils s’adapter et aider les autres à faire de même ?

Le changement climatique est là. Au-delà de tout faire pour réduire les émissions et ralentir le rythme du réchauffement climatique, les pays doivent également s’adapter aux conséquences climatiques afin de pouvoir protéger leurs citoyens. Les retombées varient selon l’endroit. Cela pourrait signifier le risque de plus d’incendies ou d’inondations, de sécheresses, de journées plus chaudes ou plus froides ou d’élévation du niveau de la mer. Les leaders du monde, les gouvernements et les états membres de la Convention avaient réitéré leurs engagements à la COP-26 pour une action globale renforcée sur l’adaptation. Il faut que la COP-27 fasse les progrès cruciaux nécessaires et pousse toutes les parties à démontrer la volonté politique nécessaire pour capturer et évaluer les progrès vers une meilleure résilience et supporter les communautés les plus vulnérables. Au-delà de ce objectif global, la COP-27 devrait l’occasion d’un agenda global amélioré pour des actions sur l’adaptation, confirmant ce qui a été convenu à Paris et plus tard dans le Pacte de Glasgow en ce qui a trait à placer l’adaptation au-devant de l’Action global.

3. Finance climatique : A quel niveau les pays riches et les bailleurs sont-ils prêts à financer les actions de réduction des effets du changement climatique?

Le financement climatique devrait être à nouveau un thème majeur de la COP27. Les pays en développement lancent déjà un appel fort aux pays développés pour qu’ils assurent un soutien financier suffisant et adéquat, en particulier pour les plus vulnérables. Lors de la COP27, il est essentiel que des progrès significatifs sur la question cruciale du changement climatique. L’importance de l’adéquation et de la prédictibilité de la finance climatique est capitale pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. Donc, il y a un besoin de renforcer la transparence des flux financiers et l’accès facilité pour satisfaire les besoins des pays en développement, particulièrement l’Afrique, les pays les moins développés et les petits états insulaires en développement. Du progrès dans le décaissement des 100 billions de dollars annuels apportera plus de confiance entre les pays développés et les pays en voie de développement, montrant que les engagements pris sont en train d’être remplis.

4. Collaboration: Comment atteindre la collaboration de toutes les parties prenantes pour parvenir à l’objectif global de 1.5o C?

Améliorer et faciliter l’entente dans les négociations étaient d’une extrême importance pour la Présidence de la COP27 visant à obtenir des résultats de manière équilibrée. L’avancement de partenariat et de collaboration devrait aider à atteindre les objectifs et assurer que le monde adopte un modèle économique plus résiliente et durable où l’être humain est placé au centre des discussions climatiques. Les négociations des Nations-Unies sont sur une base consensuelle et parvenir à un accord nécessite la participation inclusive et active de toutes les parties prenantes. Les gouvernements, le secteur privé et la société civile doivent travailleur en tandem pour transformer la manière dont nous interagissons avec la planète. De nouvelles solutions et des innovations, aidant à soulager les impacts négatifs du changement climatique doivent être introduites.

Un membre de la Délégation haïtienne prend la parole sur les tribunes des Nations-Unies, à la 27ème conférence des parties pour transmettre le discours du Ministre de l’environnement.

Le bilan de la 27ème Conférence des parties

Selon les informations publiées sur le site de la CCNUCC, le 20 novembre 2022, La Conférence des Parties (la COP 27) s’est clôturée sur un accord décisif visant à fournir un financement des pertes et préjudices aux pays vulnérables durement touchés par les catastrophes climatiques. Cela répond à l’objectif 3 relatif au financement climatique. Mais, d’après le Président de la COP26, Alek Sharma, rapporté par Euronews, « les mesures pour s’engager à un pic des émissions en 2025 comme la science nous le recommande, Le suivi clair de la réduction progressive du charbon, et l’engagement net à éliminer progressivement tous les combustibles fossiles ne sont pas dans ce texte de l’Accord et le texte sur l’énergie s’est affaibli dans les dernières minutes. »

Au regard du premier objectif, selon ce qui est publié par le CCNUCC un programme de travail sur l’atténuation a été lancé à Charm el-Cheikh, visant à intensifier de toute urgence les ambitions et la mise en œuvre de l’atténuation. Ce programme de travail débutera immédiatement après la COP 27 et se poursuivra jusqu’en 2030, avec au moins deux dialogues mondiaux organisés chaque année. Les gouvernements ont également été invités à réexaminer et à renforcer les objectifs fixés pour 2030 dans leurs plans nationaux pour le climat d’ici à la fin de 2023, ainsi qu’à accélérer les efforts visant à réduire progressivement l’énergie produite à partir du charbon et à supprimer les subventions inefficaces accordées aux combustibles fossiles. Le texte de la décision reconnaît que la crise énergétique mondiale sans précédent souligne l’urgence de transformer rapidement les systèmes énergétiques pour qu’ils soient plus sûrs, fiables et résilients, en accélérant les transitions propres et justes vers les énergies renouvelables au cours de cette décennie d’action critique.

Par rapport au 2ème objectif, les gouvernements s’accordent sur la manière de faire avancer l’objectif mondial sur l’adaptation, qui sera conclu lors de la COP 28 et alimentera le premier bilan mondial, améliorant la résilience des plus vulnérables. De nouvelles promesses de dons, d’un montant total de plus de 230 millions USD, ont été faites au « Fonds d’adaptation lors de la COP 27 ». Ces promesses aideront beaucoup plus de communautés vulnérables à s’adapter au changement climatique grâce à des solutions d’adaptation concrètes.  

Sur le site officiel de CCNUCC, il est fait mention de nombreuses annonces faites lors de la conférence :

Cinq points clés à retenir de la 27ème Conférence des parties

  1. La création d’un fonds dédié aux pertes et préjudices en faveur des pays vulnérables durement touchés par les inondations, sécheresses et autres catastrophes climatiques.
  2. Les pays ont réaffirmé leur engagement à limiter l’augmentation de la température mondiale à 1,5°C au-dessus des niveaux préindustriels. Cela signifie que l’économie mondiale doit être capable de prendre des mesures d’atténuation des changements climatiques, en d’autres termes, réduire ou prévenir l’émission de gaz à effet de serre pour atteindre les objectifs fixés par la science d’ici à 2030.
  3. La transparence des engagements des entreprises et des institutions sera une priorité de l’ONU Climat en 2023. Le Secrétaire général de l’ONU a demandé à l’ONU Climat de présenter un plan au début de l’année 2023 sur la façon d’assurer la transparence et la responsabilité avec les acteurs non étatiques.
  4. Appel lancé aux pays développés pour qu’ils fournissent des ressources pour la deuxième reconstitution du Fonds vert pour le climat. Tous les pays se sont félicités des récentes promesses faites au Fonds d’adaptation (pour un total de 211,58 millions de dollars), au Fonds pour les pays les moins avancés (pour un total de 70,6 millions) et au Fonds spécial pour le changement climatique (pour un total de 35 millions). Lors de la COP 27, les délibérations se sont poursuivies sur la fixation d’ « un nouvel objectif collectif quantifié pour le financement du climat en 2024, en tenant compte des besoins et des priorités des pays en développement. »
  5. Les nations ont notamment décidé de rendre ambitieuse, juste et équitable la transition vers un développement à faibles émissions et résilient au changement climatique, en décidant d’établir un programme de travail sur la « transition juste », qui devrait s’appuyer sur les travaux visant à renforcer d’urgence l’ambition et la mise en œuvre des mesures d’atténuation, et les compléter.

Conclusion

Tout comme la COP-26 et les autres conférences antérieures, la 27ème conférence des parties a débouché sur de grandes promesses. La toute nouvelle avancée dans ces promesses est la constitution du fonds pour les pertes et préjudices en faveur des pays vulnérables ayant subi les chocs dus au changement climatique. Les organisateurs de la Conférence semble être satisfaits d’avoir pu déboucher sur un ou plusieurs accords. Cependant, plus d’une des parties prenantes ayant une plus grande sensibilité aux effets du changement climatique ont qualifié le bilan de mitigé. Une déclaration finale, rapporte la France24, fruit de nombreux compromis, a été finalement adoptée, appelant à une réduction « rapide » des émissions mais sans ambition nouvelle par rapport à la dernière COP de Glasgow en 2021. 

Selon le Secrétaire générale de l’ONU, Antonio Guterres, la COP27 n’a pas répondu à la question sur la réduction drastique immédiate des émissions de gaz à effet de serre, rapporte le média. France 24, souligne également la déception exprimée par l’Union Européenne de l’accord sur les émissions. 

Selon Davide Faranda de l’Université de Sorbonne, à Paris, les scientifiques ne sont pas très enthousiastes par rapport au résultat de cette COP. Certes, c’est une bonne chose de trouver un accord concernant la question des pertes et dommages des pays du Nord vis-à-vis de ceux du Sud. Mais, malgré quelques annonces de dons, aucun mécanisme de financement à l’échelle mondiale n’a pour le moment été voté et il ne s’agit que d’un accord de principe. Or, lorsqu’un accord n’est pas contraignant ni chiffré, il n’est généralement pas respecté. Il n’y a eu, durant cette COP, aucune avancée sur la réduction des émissions de CO2 de la part de la communauté internationale. Et plusieurs pays, comme l’Arabie saoudite et la Chine, ont même essayé de supprimer la mention de l’objectif de l’Accord de Paris de 1,5°C, jugé trop contraignant. L’autre échec de la COP 27, selon Faranda, concerne la suppression progressive des énergies fossiles. Aucune mention n’est faite sur la réduction de l’utilisation du pétrole ou du gaz, pourtant responsables des augmentations de CO2. Le texte mentionne seulement que les pays s’engagent à accélérer la réduction de l’utilisation du charbon et la sortie des subventions inefficaces aux énergies fossiles.

La délégation haïtienne, ayant pris part à cette Conférence, n’a pas été non plus satisfaite. Lors d’une conférence-bilan, le 5 décembre 2022, rapportée par Le Nouvelliste, le Ministre de l’Environnement regrette que le programme de travail sur l’intensification urgente de l’ambition d’atténuation n’ait pas fait de grandes avancées au cours de cette COP. Les pays ont convenu d’un processus qui explorera des sujets à décider et identifiera les opportunités et les lacunes pour réduire les émissions, a-t-il fait remarquer. Selon les conférenciers, la République d’Haïti regrette que des décisions concrètes n’aient pas été adoptées pour doubler le financement pour l’adaptation d’ici 2025, comme promis à la COP Glasgow par les pays développés.